Illustration : Garance (@garancebb)
En secondaire trois, il s’en est passé des affaires! Je pourrais vous raconter comment s’est déroulé mon premier bain de minuit ou ma première soirée alcoolisée, mais le plus vif souvenir que j’ai de cette époque de crise d’adolescence est le moment où j’ai commencé à me questionner sur ma sexualité.
C’était à la 3ème période de la journée et j’étais assise dans le bureau d’une TES (technicienne en éducation spécialisé) dans le but de l’alerter sur les comportements malsains d’une bonne amie. Sélina avait beaucoup de souffrance en elle et représentait un danger pour elle-même. La TES qui montait son dossier m’a demandé : « sais-tu si Sélina serait lesbienne? » Sur le coup, la TES voulait simplement savoir si ce n’était pas un aspect de sa vie qu’elle avait de la difficulté à accepter. Pourtant, cette question m’a frappé de plein fouet. Pour moi, cela a été l’introduction d’une petite voix dans ma tête qui me visitait quotidiennement et qui me demandait : « Suis-je lesbienne? »
L’homosexualité. Ça ne m’était jamais vraiment venu à l’esprit avant. Pourrais-je être homosexuelle? Encore aujourd’hui, je ne sais pas pourquoi je me suis sentie interpellée par cette question. La majorité de mes amies avaient un copain, on ne parlait que de garçons puis on s’attendait toutes à trouver le prince charmant. L’homosexualité n’était pas un sujet tendance et une lesbienne semblait aussi rare qu’une licorne.
Puis en secondaire cinq, j’ai eu un copain. Une relation qui a duré relativement longtemps pour des jeunes et qui m’a introduite aux relations sexuelles. Lors de ce premier amour, j’en ai presque oublié la question et, si elle me revenait tout de même de temps en temps, j’y répondais par : « mais non, je suis en couple avec une personne du sexe opposé, je ne peux pas être lesbienne! »
Je vais vous avouer tout de suite qu’à cette époque j’en connaissais très peu sur la bisexualité. Ce qui n’est pas si surprenant, comme le terme est devenu familier il n’y a que quelques années. En plus, on ne nous parlait pas vraiment de ces choses-là à l’école. Alors, à moins de fouiller toi-même sur Internet, tes chances de savoir ça veut dire quoi être bisexuel.le ou pansexuel.le étaient plutôt minces. Encore aujourd’hui certain.e.s refusent d’admettre que ces identités existent, comme si on leur parlait de la Fée des dents!
Après le secondaire, peut-être grâce au changement d’environnement ou à la plus grande visibilité de la communuauté LGBTQ+, je n’avais plus aussi peur de faire face à la petite voix qui me hantait pour trouver une réponse juste qui me représenterait. Dans une nouvelle phase de découverte de soi, j’ai commencé à me remémorer mon passé pour trouver des indices sur mon attirance inconsciente envers les femmes.
Par exemple, en regardant des films, j’étais parfois jalouse de la fille d’être avec un garçon aussi charmant et parfois jalouse du garçon d’avoir la chance d’être avec une fille aussi sympa et cute. Du style Selena Gomez et son copain loup-garou joué par Gregg Sulkins dans Les sorciers de Waverly Place. Autant que l’acteur m’avait tapé dans l’oeil, la chanteuse ne me laissait pas indifférente non plus.
Un autre indice : dans les rares rêves érotiques que j’ai eus, mon amante était toujours une femme. Une partenaire mystérieuse dont je ne voyais pas le visage, mais qui me faisait jouir jusqu’à l’orgasme. En contradiction, quand je rêvais d’hommes, c’était des relations d’amour platonique. Peut-être que c’est dû à tous les films et livres de romance hétérosexuelle, mais les contes de fées dont je rêvais la nuit comportaient un prince et non une princesse.
Finalement, j’avais des kicks sur des vraies femmes. Ce que je croyais être de la forte amitié, était probablement un sentiment plus fort. Même avec toutes ces évidences, j’étais aveuglée.
Aujourd’hui, je comprends la largeur du spectre de la sexualité, mais je ne veux pas m’arrêter à un terme pour me définir. J’ai accepté que je n’étais pas hétéro, mais je n’ai adopté aucune autre orientation. Alors, je ne me sens pas à ma place avec une étiquette. On dirait que j’ai peur de me tromper. Je sais que l’identité en questionnement et l’identité queer existent aussi, mais je ne me sens pas interpellée par ces descriptifs non plus.
C’est simple, j’en veux pas. Je n’ai pas l’impression que ça me serait particulièrement utile. Mais serait-ce un privilège de femme blanche que de ne pas me sentir pressée d’entrer dans la communauté LGBTQ+ et de refuser les étiquettes? On en parlera une autre fois.
Il y a quelque chose de grandiose à adopter un adjectif pour se définir. Peut-être que je ne suis pas encore assez confortable pour choisir un terme à dire à voix haute précédé de « Je suis », ou peut-être que je ne veux pas me limiter dans ma propre sexualité. Pour le moment, je veux juste être moi, et me caser dans une boîte ne me convient pas vraiment. Comme je vous ai dit, j’ai pas fini de me questionner et j’aime cette liberté.
Il n’y a pas de limites,
Princesse Chihiro
Princesse Chihiro, jeune femme d’affaires accomplie, enthousiaste des sports et fanatique du continent asiatique, elle voudrait donner une voix à celles.ceux qui ne peuvent pas se le permettre et est horrifiée lorsque les survivant.e.s d’agressions sexuelles ne sont pas pris.es au sérieux. #metoo
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