Illustration : Garance (@garancebb)
Le sexe, ça peut être mécanique. Mécanique comme dans je n’ai pas envie. Tellement pas envie de faire ça avec toi ici. Te voir enlever tes pantalons, baisser tes boxers, j’ai envie de vomir. Pis tu me dis que tu vas me baiser, peu importe ce que j’en dis. Sauf que je ne suis pas excitée. Je n’ai pas envie que tu me touches, encore moins que tu sois en moi. Pour toi, c’est la dernière chance avant neuf mois. Pour moi, c’est un supplice désagréable. Je me touche pour me stimuler, pour pouvoir en finir au plus vite. T’es au-dessus de moi, je ferme les yeux. T’es à l’intérieur de moi, mais je veux juste oublier que tu es là. Je veux juste m’imaginer que je suis seule. Seule avec moi-même. Mais c’est trop long. Vas-tu finir par venir? que je te demande. Tu es froissé, fâché même. Moi aussi. Tu continues tes mouvements égocentriques de va-et-vient. C’est ironique, parce qu’on est censé.e.s s’aimer. Peut-être qu’on devrait faire l’amour? Mais en fait on s’utilise pour arriver à jouir. C’est froid, c’est mécanique et ça me donne la nausée. Nos orgasmes sont comme le son d’une cloche. Enfin terminé. Soulagement.
Le sexe, ça peut être comme cette fois durant l’été. L’été où tu faisais une heure et demi de route pour venir chez moi et une heure et demi de route pour retourner chez toi. La fois surtout, cette fois où tu avais envie de coucher avec moi. Et moi, je ne ressentais toujours pas de désir, juste un peu de pitié. Cette fois où je me suis laissée faire. Cette fois où je suis restée allongée sur le dos. Cette trop longue fois durant laquelle je me sentais spectatrice. Je peux encore voir tes yeux dans le vide, trop concentré sur ton propre plaisir. Tes mouvements de bassin sur moi. L’inertie de mon corps et surtout l’absence dans mon regard. La prière pour que tu en finisses vite.
Le sexe, ça peut aussi être comme toutes ces fois où j’ai cédé. Pas parce que j’éprouvais du désir, non. Parce que tu me mettais la pression. Parce que crois-tu que ce soit normal de dormir tous les soirs dans le même lit sans baiser? Parce que penses-tu que c’est normal de passer six jours sans qu’on couche ensemble? Parce que de quoi penses-tu que j’aurais l’air si les gars savaient ça? Parce que toi, anyways, on le sait, ça ne te tente jamais. Parce que toi, dans le fond, tu ne m’aimes pas. Parce que, [énorme soupir], laisse donc faire.
Toutes ces fois où j’ai cédé, où je me suis laissée faire. Parce que, dans le fond, je ne connaissais rien d’autre que ça. Parce que je pensais que c’était normal. Que la libido des filles diminue avec le temps, et la libido des gars, elle, est là pour exciter les filles et les convaincre d’avoir des rapports sexuels. Ben, fuck. Non. Non. Non. Je ne sais pas s’il faut que je le répète encore : non. Parfois, ça m’arrive d’y repenser. Pis je me pose encore la question : est-ce que j’ai été violée par mon propre chum? Est-ce que je suis la grande coupable parce que je n’ai pas assez insisté sur ma non-volonté de poursuivre l’acte? Es-tu le fautif de ne pas avoir saisi que l’inexistence de mon désir était un signal d’alarme, une façon de dire non? Est-ce que c’était assez évident à percevoir? As-tu même conscience du tort que ça m’as causé? Câlisse. Me semble que tu le sens quand quelqu’un ne veut pas de toi?
Après des discussions avec plusieurs amis de sexe masculin, je me suis rendue compte que ce qui est clair pour minou n’est parfois pas aussi clair pour pitou et vice versa. Ça fait que, habituons-nous, autant les hommes que les femmes, à demander le consentement avant et pendant l’acte. Parce que oui, réitérer le consentement d’une personne ça peut être fucking sex. Est-ce que je peux enlever tes pantalons? Ayoye, oui. Enlève-les, oui. Est-ce que t’es à l’aise avec le fait que je mette mes doigts là? Fuck oui, continue. Est-ce que ça te dérange que je te touche là? Vraiment, vraiment pas… Ce sont de petites phrases, pas du tout difficiles à prononcer, mais tellement capitales. Facque vous attendez quoi? Osez! Parce que le consentement, esti que c’est un turn on!
Médusa
Médusa, étudiante en communication, dont les propos peuvent parfois être venimeux, n’a pas la langue dans sa poche. Provocante et animée par la sexualité, elle débat pour déconstruire l’image de la pute, de la vierge et de la mère.
Pour lire le dernier article de Médusa – Le bal des finissant.e.s et faire l’amour pour la première fois : même combat – c’est ici!
Ce sujet est intéressant: demander, s’assurer du consentement du partenaire est une bonne chose. Je trouve néanmoins que l’exemple choisi ne correspond pas au thème de l’article. En effet, il semble être plus un gros problème de communication entre les 2 partenaires (et là, je me base sur la lecture de l’article pour dire ça) qu’autre chose. Problème probablement basé sur les stéréotypes associés au sexe, du genre: « t’es un gars, tout ce que tu veux c’est baiser » alors que un gars qui est prêt à faire 3 hres de route, c’est avec TOI, tout au moins, qu’il veut « baisé » (ce qui est une énorme différence). Et de l’autre côté, « t’es une fille, t’aime pas vraiment baisé » (!?). Quand on a ce genre de stéréotype, difficile d’établir un dialogue sur le sujet. Pourtant, cette situation pourrait être désamorcée: « Écoute, ça me tente pas vraiment ces temps-ci, je comprends pas pourquoi, j’aimerai qu’on en parle », ou « j’ai l’impression que ça te tente pas et c’est pas la première fois, pourquoi? » C’est l’occasion d’avoir une discussion qui semble absolument nécessaire et qui permettra soit d’approfondir la relation, soit d’y mettre fin mais surtout de clarifier les choses.
Autre point, on ne devrait jamais attendre que la question vienne du partenaire lorsque quelque chose ne nous tente pas, c’est remettre son sort entre ses mains. Je préfère toujours être responsable de moi-même: « hum, pour l’instant, ça ne me tente pas que tu enlèves tes pantalons ». Et le problème du consentement viens après, lorsqu’on a dit clairement: « non », « ça ne me tente pas », etc. et que ce n’est pas pris en compte par le partenaire.
En fait, l’exemple choisi dans l’article est un exemple super intéressant parce qu’il montre comme on peut « baisé » sans communiquer, jusqu’où on peut aller parce qu’on se sent coupable, pas normale, qu’on pense « qu’on doit quand même », qu’on ose pas s’affirmer. C’est un apprentissage difficile pour les filles parce qu’on ne les éduque pas à s’affirmer, à être sûres d’elles, à aller à l’encontre du quand dira t’on, à dire non à un homme. Merci Cobra, de nous avoir partager cette réflexion.