Illustration : Éliane (@lily364)
L’autre jour j’étais en char, sur la 15, avec ma mère. Ah pis on le sait, la maudite 15, c’est tout le temps bouché. Ça laisse en maaaasse le temps de discuter. Ça fait que le temps s’écoule, on jase. Demandez-moi pas comment on en arrive là, mais on finit par parler de Tinder, de fuckfriends pis de one-night. Quand tout à coup, (marqueur de relation essentiel pour souligner la péripétie qui va suivre) ma mère s’exclame : Moi, je crois pas à ça une fille qui couche avec un gars juste pour le sexe. Une fille, ça fait l’amour avec sa tête, avec son coeur. Les gars, oui, ok, je comprends ça, mais une fille… Il faut que tu aies des sentiments pour coucher avec un gars, après tout, c’est toi qui reçois quelque chose en toi.
Voyons esti! C’est donc ben hétéronormatif ça! J’ai pensé à me jeter en bas de l’auto en signe de protestation. Finalement, j’me suis dis qu’écrire un texte aurait probablement plus de portée (ok, fair enough, ça me permettait aussi de rester en vie). Aweille la grande! Essaie-donc de déconstruire l’image négative des fuckfriends, astheure.
En fait, ce qui me met particulièrement en crisse, c’est que ces clichés empoisonnants persistent encore. Genre, les gars sont forcément tous des trous de cul qui profitent des filles. Et les femmes ont toutes besoins d’amour et de tendresse pour pouvoir coucher. Parce qu’évidemment, les filles ne sont pas capable de coucher avec des garçons sans éprouver de profondes passions pour eux. Les femmes, elles, ne peuvent pas désirer se satisfaire sexuellement, point barre. Non. Et celles qui le font et qui en retirent du plaisir sont forcément toutes des salopes. Les vilaines sorcières! Tout comme les hommes qui ont des partenaires d’un soir sont forcément des enculés. Ben voyons! Elle est persistante l’image démonisée de la sexualité quand même!
Oui, les filles peuvent elles aussi avoir une vie sexuelle, en retirer du plaisir et guess what? ne pas s’amouracher de leur partenaire. Autre scoop : les hommes ne sont pas tous la yenk pour le cul. C’est pas une question de genre, mais bien de personne. I mean, j’en connais plein moi des hommes qui ne voudraient pas avoir de sexe sans avoir appris à connaître leur partenaire avant, et j’en connais aussi plein des femmes qui ne connaissent pas les noms de famille (et parfois même les prénoms) de toustes leurs partenaires. Pis ça fait pas d’elleux de bonnes ou de mauvaises personnes pour autant.
Pis tsé, c’est pas parce que c’est une baise sans attache que tu fais ça avec n’importe qui et que tu ne te soucies pas de la personnalité de l’autre. Genre, jeune femme désagréable recherche une personne tout aussi désagréable pour une baise sans plaisir. Re-voyons! Il faut quand même ben un minimum d’affinité et d’attirance entre les partenaires pour que le sexe soit bon.
Et aussi, c’est pas parce qu’il n’y a pas de relation amoureuse qu’il ne peut pas y avoir de tendresse. Entre la p’tite vite dans les toilettes d’un bar et l’ami.e qui vient parfois dormir en cuillère pas d’bobettes dans ton lit, il y a une panoplie de relations érotiques/sensuelles/sexuelles qui peuvent être construites.
En fait, avoir un.e fuckfriend, ça rend juste les choses tellement plus simples.
Pas besoin de build-up à la relation sexuelle. T’as une envie de sexe, un petit texto – As-tu envie de baiser ce soir? – et hop! La proposition devient aussi innocente que : as-tu envie d’aller au cinéma ce soir? Et avec un peu de chance, si l’autre en a l’envie et le temps, les choses se passent. Si non, tant pis.
Pas besoin d’entretenir la romance, puisqu’il n’y en a pas. Pas de culpabilité à ne pas vouloir baiser, de peur d’heurter l’égo de l’autre. Pas de scrupules à mettre fin à la relation de fuckfriends quand on passe à autre chose ou qu’on fait une rencontre plus sérieuse (si je me fie à mes statistiques personnelles, c’est quand même quelque chose de fréquent), puisqu’il n’y a aucun engagement particulier. Genre, à la fin d’une baise incroyable : ouain, j’pense qu’on pourra pu coucher ensemble, j’ai comme rencontré quelqu’un.e… Ah ben coudon, ok, ben c’tait l’fun le temps que ça a duré.
Pas besoin de déployer de grands efforts de charme ni d’érotiser la relation tout au long de la soirée comme avec un one-night potentiel, notre partenaire a déjà envie de nous enlever toutte notre linge et on le sait déjà pertinemment.
Pas besoin de ménager l’égo de l’autre personne lorsqu’iel fait une job ordinaire. After all, on est là touste les deux pour du bon sexe. Appuie moins fort sur mon clitoris, à la longue ça fait vraiment mal! Quand tu me suces, j’aime ça que tu me regardes. Bref, avoir un.e fuckfriend, c’est un peu comme se masturber, mais à deux. Ça peut être très instructif.
Tsé, au final, la seule forme de sexe qui demande moins d’effort que d’avoir un.e fuckfriend, c’est la masturbation. Et encore, la masturbation ça passe généralement beaucoup moins bien dans les lieux publics (certain.e.s. l’auront appris à leurs dépens).
Alors tant que les partenaires sont consentant.e.s et heureux.ses dans leur relation de fuckfriend, je ne vois vraiment pas le problème. Surtout que ça permet à certain.e.s de s’épanouir dans leur sexualité et de développer leur estime de soi. Ça peut être une relation tout aussi belle et enrichissante qu’une autre. Alors cessons de shamer les fuckfriends!
Gloire aux fuckfriends,
Médusa & Padmé
Médusa, étudiante en communication, dont les propos peuvent parfois être venimeux, n’a pas la langue dans sa poche. Provocante et animée par la sexualité, elle débat pour déconstruire l’image de la pute, de la vierge et de la mère.
Pour lire le dernier article de Médusa – Je suis une femme et j’ai une moustache – c’est ici!
Étudiante en physio, Padmé écrit pour se vider la tête et faire avancer ses réflexions. Drivée par les questions de genre, elle refuse de se faire enfermer dans une image stéréotypée de la femme. La preuve, il n’est pas rare de la trouver les deux mains dans la graisse de vélo en train de chanter du Céline Dion à tue-tête.
Pour lire le dernier article de Padmé – Sur la confiance en soi – c’est ici!
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