Illustration : Layloo (@layloolapierre)
Dans ma vie, j’ai surtout utilisé l’anneau vaginal pour prévenir mes grossesses. De la fin de l’adolescence jusqu’à mes 25 ans, puis de 28 ans à maintenant, j’ai fait usage de l’anneau vaginal, que j’insère après mes règles et que je retire trois semaines plus tard. Un des effets secondaires possibles de l’anneau vaginal est de baisser le désir sexuel, dû à sa libération d’hormones qui régulent le système reproducteur.
Dans les dernières années, beaucoup de choses ont changé chez moi, notamment dans ma relation à la sexualité. Par le passé, j’ai beaucoup utilisé cette dernière pour apaiser mon anxiété, et pour me sentir appréciée dans mes relations intimes. La sexualité me donnait un boost d’énergie, de la confiance en soi, du plaisir qui me permettait de m’échapper des petits et des grands soucis de la vie. Puis, j’ai fait beaucoup d’efforts pour déconstruire ce pattern que j’avais, parce que j’ai réalisé qu’au-delà d’une gratification immédiate, la recherche de sensations fortes et de performance dans la sexualité me nuisait. Par exemple, c’était difficile d’être appréciée pour autre chose que ma sexualité dans mes relations moins stables. La sexualité me faisait aussi éviter des enjeux de fond dans mes relations les plus sérieuses comme les plus frivoles, tels que de faire face à ma peur de l’abandon.
Toute cette mise en contexte est pour dire que dans les dernières années, mon désir sexuel a changé. Quand j’ai recommencé à prendre l’anneau, il est devenu moins impulsif, moins soudain et beaucoup plus tranquille. Je pensais que ça avait beaucoup à voir avec tout ce travail que j’ai réalisé sur moi-même, mais je n’étais qu’à un incident près de réaliser à quel point j’avais tort.
Il s’avère que, dernièrement et comme tous les mois, j’ai inséré mon anneau vaginal (que je surnomme désormais affectueusement Mon Précieux) sept jours après avoir retiré le précédent. Puis, quelques jours après, mon chum et moi, on a voulu avoir une relation sexuelle avec pénétration. Fidèles à nos habitudes, on s’est apprêtés à retirer Mon Précieux, parce qu’on trouve ça plus confortable.
Au moment de pratiquer notre rituel d’aller à la pêche à l’anneau afin de s’adonner à notre sexy time, mon chum tout confus m’a dit qu’il n’arrivait pas à trouver mon anneau. Encore plus confuse que lui, j’ai essayé de repasser le film de ma vie des derniers jours dans ma tête, pour voir qu’est-ce qui aurait bien pu expliquer cela, mais sans trouver de réponse. J’ai demandé à mon chum d’entrer ses doigts (plus longs que les miens) le plus profondément possible dans mon vagin, afin de voir si Mon Précieux n’était pas logé plus loin qu’à l’habitude. Le sentant me frictionner le col de l’utérus, je me suis bien rendue à l’évidence : Mon Précieux était disparu dans les limbes. La vérité, c’est que je ne sais pas comment ça a pu se passer. Ça ne m’est jamais arrivé, en 8 ans d’usage de l’anneau vaginal, qu’il tombe, encore moins sans que je m’en rende compte! Il doit avoir glissé quand je suis allée aux toilettes une nuit, à moitié endormie, mais je ne saurai jamais avec certitude dans quel égout, voire dans quelle galaxie lointaine il est rendu.
On ne savait pas depuis combien de temps Mon Précieux nous avait quitté.e.s, et donc à quel point on était à risque de grossesse imprévue. Mon chum était d’accord avec l’idée qu’on se passe de relation sexuelle vaginale pour un mois, et que je reste sans contraception hormonale jusqu’à la fin de mon prochain cycle menstruel (je suis allergique au latex, donc exit les condoms, et je n’aime pas assez jouer avec le feu pour pratiquer le coït interrompu). Ça a fait en sorte que pour la première fois depuis deux ans et demi, j’ai vécu une ovulation.
Oh boy, oh boy! C’est vrai que j’ai travaillé fort, très fort, sur moi-même pour changer mon rapport à la sexualité. Mais durant ma période fertile qui se manifeste de plusieurs façons (légères douleurs au ventre, mamelons sensibles, et LIBIDO DANS LE TAPIS), j’ai reconnecté avec l’idée que mon désir sexuel des dernières années était plus tempéré par ma prise de contraceptif hormonal que par ma croissance personnelle. Je ne sais pas si j’ai aimé vivre ça. Je me suis sentie comme si je n’avais presque pas de contrôle sur mes impulsions sexuelles, j’avais de la difficulté à me concentrer au travail, au point que même les objets inanimés étaient presque sexy à mes yeux. Certes, j’ai par la bande vécu un weekend plus épicé que d’habitude avec mon chum, mais je me serais passée des pensées intrusives et de l’attirance pour des gens (voire des objets inanimés!) que je revois aujourd’hui en me questionnant sur moi-même.
Note pour Mon Précieux : ta disparition m’a fait vivre une montagne d’émotions, mais je suis contente que tu m’aies quittée. J’ai pu réapprivoiser mon corps fertile le temps de quelques jours. Je crois que grâce à cette expérience, je suis mieux préparée pour un éventuel moment où je cesserai d’utiliser la contraception hormonale. À l’avenir, je saurai que je dois réserver du temps dans mon horaire pour batifoler au gré de mes envies sexuelles durant mes ovulations. Où que tu sois, j’espère que tu es aussi bien que si tu étais resté lové bien au chaud, contre ma douce cavité vaginale, comme tu étais supposé l’être.
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