Illustration : @viraesworks
On a toustes des patterns amoureux. Des situations qui se reproduisent encore et encore dans nos relations amoureuses. La plupart du temps, on a un contrôle sur ceux-ci une fois qu’on le réalise et qu’on le travaille. Si on sort toujours avec des personnes jalouses, on peut apprendre les red flags par exemple. La thérapie, ça aide beaucoup. Pendant la mienne, j’ai réalisé que toutes mes relations sérieuses, oui toutes, se sont terminées de la même manière : mes ex m’ont quittée pour mes amies. Et si je me suis remise de chacune de ses relations, le pattern lui, je le comprends pas. Je comprends pas comment il s’installe et je comprends pas comment ne pas le recréer.
À 15 ans, je suis sortie avec Étienne pendant quelques mois. Ce n’était pas si sérieux, mais c’était la première fois que je me sentais amoureuse. Tsé, les petits papillons dans le bas du ventre pis être confortable à ne rien dire à côté de lui. Il m’a laissée un soir, sans me donner de raison. Une semaine plus tard, il sortait avec ma voisine d’en face. I kid you not. Je ne savais même pas qu’iels se connaissaient. Elle et moi, nous étions amies, pas nécessairement proches, mais assez pour se parler à tous les jours dans l’autobus. Iels sont resté.e.s plus de dix ans ensemble. Bref, je les ai vu.e.s se frencher dans les rangées de casiers tout le reste du secondaire. Sur mon casier, en fait, Étienne étant mon voisin de case.
À 17 ans, ça faisait un an et demi que je sortais avec Kyle. C’est la première personne avec qui j’avais fait l’amour et notre relation était plutôt sérieuse. Notre rupture s’est étalée sur trois mois parce qu’il se cherchait, ne savait pas ce qu’il voulait. J’ai fini par arrêter le niaisage. Il était triste, me disant que j’étais la femme de sa vie [terme que je déteste tellement]. Nous avions une gang d’ami.e.s en commun, j’ai donc fait des efforts pour rester en bons termes avec lui. J’étais en deuil de la relation moi aussi, mais je savais que c’était la bonne décision. Deux mois après la rupture finale, j’ai appris par une tierce personne qu’il était en amour avec ma meilleure amie et que c’était réciproque. Leur relation a commencé par du sexe, deux semaines après notre rupture officielle (pendant que j’étais encore la femme de sa vie, on se rappelle). Pourtant, les occasions pour elleux de se confier à moi ont été multiples. Je les avais vus plusieurs fois dans ce laps de temps et je m’entrainais avec la fille, deux fois par semaine.
C’est le mensonge, la trahison et les cachotteries qui ont été le plus douloureux.se. Je n’étais pas surprise parce que je savais qu’iels se parlaient et se voyaient plus qu’avant. J’attendais la confidence de ma meilleure amie. J’aurais voulu la prévenir, l’avertir des travers intimes de ma relation avec Kyle, de ce que je connaissais de lui que personne d’autre ne savait. Qu’il était jaloux de nos amis hommes, qu’il jugeait tout le monde tout le temps, qu’il était encore plus perdu qu’elle à ce moment et qu’il n’allait pas l’aider dans ses questionnements sur son avenir. Je voulais la protéger avant qu’elle s’amourache de lui, mais je l’ai su trop tard. On m’a aussi accusé de « gâcher leur bonheur » parce qu’iels se sentaient mal à cause de moi. Moi, qui avait été une victime passive de leurs manigances, je devenais la méchante à leurs yeux parce que je réagissais à la vérité enfin dévoilée, parce que j’étais déçue que ma meilleure amie n’avait pas eu confiance en moi. Est-ce que c’était vraiment moi le problème dans tout ça ?
À 18 ans, j’ai eu une relation qui aurait dû rester un summer fling. Je suis tombée amoureuse, pas lui. Je ne le blâme pas. Mais encore une fois, j’ai su bien plus tard que, peu de temps après m’avoir laissée, il est sorti avec une de nos amies communes. J’ai perdu toute cette gang là, dont une de mes amies d’enfance, parce que ça me faisait trop mal de le revoir. Iels l’ont choisi lui, alors que c’était moi qui avait besoin de soutien. Et tout ça s’est passé sans confrontation, sans discussion, sans rien. Avant cette relation avec lui, j’étais une amie à part entière dans ce groupe. Après, j’étais l’ex de. À quel point je choisis mal mes ami.e.s ?
La dernière trahison en liste est de la part de l’homme avec qui j’ai partagé ma vie pendant presque 5 ans, Thierry. On habitait ensemble et, c’est vrai, notre relation battait de l’aile depuis quelques mois. J’étais au bord de la dépression et je ne voulais pas me l’admettre (i.e. j’étais off sur tout). Ceci ne l’excuse pas : il aurait pu/dû être là pour moi. Pendant quatre mois, il a discuté assidûment avec une de nos amies communes dans mon dos, Chloé. Thierry et moi avions rencontré Chloé quand elle a commencé à sortir avec David, un de nos amis proches. Je l’avais déjà invitée chez moi, je lui avais déjà confié des choses, notre amitié était réelle. Puis, Thierry m’a laissée sans avertissement, sans possibilité de discussion, sans constat préliminaire sur notre relation pour tenter de la sauver. Je lui ai demandé s’il y avait autre chose, si c’était juste que ça marchait pu, qu’il était pu heureux avec moi. Je ne voulais pas de surprise, il connaissait mon historique. Il m’a assuré que non. Il est parti de l’appart le soir même. Ça a été la goutte de trop, ma santé mentale a basculé pour de bon. Le point positif, c’est que je suis finalement allée chercher de l’aide.
Fastfoward deux mois plus tard, alors que je commence à aller mieux. J’apprends que ce fameux soir, celui de la rupture, il est allé rejoindre Chloé, que tout était planifié. Chloé avait laissé David quelques jours plus tôt. Il ne restait qu’à me sacrer là pour qu’iels puissent vivre leur aventure. Il ne m’a pas trompée (physiquement du moins), je devrais être rassurée (oui, on m’a dit ça?!). L’infidélité sans contact physique, ça reste une trahison, non ? Considérant la discussion entourant notre rupture, je ne comprends pas comment quelqu’un qui m’a aimée, a partagé ma vie, peut être si égoïste en me mentant comme ça. J’avais l’impression que je n’étais plus rien pour lui, même pas une personne qui mérite le respect de l’honnêteté.
Et mes ami.e.s savaient qu’il était avec elle depuis qu’il était parti. Personne n’a osé me le dire parce que j’allais mal. Je comprends, mais je suis déçue. Et j’ai encore perdu des ami.e.s. Pas toustes cette fois, mais assez pour pas comprendre. Qu’est-ce que vous lui trouvez de plus qu’à moi ? Pourquoi une fille qui se dit féministe comme Chloé ferait ça ? Pourquoi partager ta vie avec une femme pendant presque cinq ans et ne pas lui parler du changement de tes sentiments ? Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? Est-ce que c’est moi qui attire ce comportement ?
Et maintenant, je fais quoi ? Comment j’arrive à ne pas être méfiante envers mes ami.e.s, envers mes partenaires et leurs amitiés ? Je ne suis pas de nature jalouse, au contraire. Je fais trop confiance. Je valorise la communication et je suis toujours à l’écoute. Je me fâche lorsqu’on me ment, lorsqu’on me cache les faits sur de longues périodes. Et c’est là que je deviens encore une fois la méchante, celle qui ne comprend pas que l’amour ne se choisit pas pis blablabla. Comme si je n’avais pas droit à la colère après de tels événements. Iels masquent leur culpabilité en dénigrant ma colère, ma déception, ma tristesse. Et je perds deux fois plutôt qu’une.
Et toutes ces amitiés perdues en plus ? Pourquoi iels ont choisi mes ex (et leur nouvelle flamme)? Celleux qui m’ont fait mal ? Je devrais être contente de dodge a bullet, ces personnes ne méritaient pas ma confiance. Je ne peux que me demander ce que ça veut dire sur moi ? Est-ce que c’est moi le problème, si on arrive à me faire subir ça sans remords ? Ma psy m’a dit que je ne peux pas contrôler les actions des autres et que celles-ci ne sont pas nécessairement le reflet de ma personne. C’est plus facile à dire qu’à accepter. Je ne devrais pas attendre de mea culpa de leur part, mais on dirait que ça me ferait un petit baume. Ça validerait les sentiments que j’avais à ces moments-là.
Qu’est-ce que j’aurais pu faire différemment ? Devenir plus suspicieuse des comportements de mes exs afin de ne pas me faire surprendre ? C’est tellement malsain. Piler sur mon orgueil et ma souffrance pour rester ami.e.s ? Je ne suis pas certaine que ça en aurait valu la peine. Les confronter, leur poser toutes ces questions en face ? Les quelques fois que j’ai réussi à le faire, ça n’a fait qu’encourager leur antagonisme à mon égard. Non, je sais que, sans avoir été parfaite dans ces situations, j’étais perdante d’avance. Et maintenant, je dois apprendre à let it go. Ce texte m’aide un peu, mais je vais pas cacher que je veux faire valider mon ressenti. J’ai peur en esti que l’histoire se répète, qu’on me laisse pour un.e ami.e. Encore.
Triss Merigold
Historienne, archiviste, militante, fière féministe frustrée et poilue, et sorcière à ses heures, Triss Merigold replonge dans l’écriture avec douceur. Elle rêve de devenir la prochaine autrice de romans historiques québécois à succès. Toujours prête à écouter ses ami.e.s et sa famille avec une tasse de thé à la main et une couverte sur les genoux, elle se qualifie de matante accomplie.
Pour lire le dernier article de Triss Merigold – J’ai vécu avec un alcoolique – c’est ici!
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