Illustration : Éliane (@lily364)
C’est drôle, y’a jamais personne qui m’a textuellement dit : Fille, tu ne dois jamais, mais J-A-M-A-I-S baiser quand tu es dans ta semaine. Pourtant, tel un conseil prodigué de génération en génération (un peu du genre attends « le bon »), j’ai toujours, du plus loin que je me souvienne, cru que c’était pas faisable.
Pis quand je dis pas faisable, je pensais à ça de toutes sortes de façons. Peut-être que le vagin n’était tout simplement pas fait pour recevoir quelque chose en lui pendant qu’il était occupé à expulser du sang. Peut-être que le pénis pouvait subir des dommages. Peut-être que c’était absolument douloureux pour la femme. Peut-être que c’était juste physiquement impossible d’avoir une pénétration. Bref, la conclusion me semblait toute simple : ça ne se faisait pas, point final. I mean, à mes yeux, c’était une certitude aussi immuable que la terre est ronde. Ouin…
C’est longtemps resté mystérieux-vague-interdit-tabou. Principalement parce que je n’avais pas de relations sexuelles. Sauf que mes interactions avec « les dévergondées » de mon âge qui osaient « faire le sexe » avec leur chum de plus de trois ans (oui il faut le préciser) confirmaient, peut-être sans le savoir, mes théories pseudo-conspirationnistes. Ah ouin, avec Phil on n’a pas pu LE faire parce que j’étais menstruée. Oui, car à cette tendre époque, user des termes baiser, faire l’amour ou encore, avoir une relation sexuelle était une pratique risquée! Après tout, on pouvait se retrouver sur le bûcher des salopes à tout instant.
Une autre fois, lors d’une soirée pyjama où les potins étaient à l’ordre du jour : non mais les filles, anyways, il se serait absolument rien passé ! J’étais dans ma semaine de toute façon! Et plus tard, ç’a été le tour de mes amies qui avaient un fuckfriend, qui avaient l’impression de coincer le gars, de le piéger même, lorsqu’elles avaient leurs règles et qu’elles allaient « quand même » les voir. Ou encore, il y avait celles qui s’adonnaient à une espèce de politique de dédommagement. Ouin ben, tsé, j’suis allée voir Vince hier, j’étais dans ma semaine, facque, tsé, je l’ai sucé à la place. Non, pas genre je l’ai sucé parce que j’avais envie de le faire, je l’ai sucé à défaut de ne pas être « propre » pour avoir une relation sexuelle.
Quand j’ai commencé à avoir des partenaires sexuels donc, ma vision de la chose s’est légèrement transformée. J’avais conscience (ou en tout cas j’étais convaincue) que c’était « impossible » et que j’étais « sale », mais j’avais quand même envie de coucher avec l’autre, et de sentir ses doigts ou sa langue sur mon clitoris. Mais je ne pouvais pas. Ou du moins j’avais la ferme conviction que je ne pouvais pas.
Deux ados qui ont envie de baiser, mais qui ne peuvent pas parce que… Parce que quoi au juste? Laissez-moi vous dire que ça crée de la tension sexuelle en taaaaaaaaaaaaaaaaaaa! Pis que rapidement, on a envie de briser les règles (haha). Et, briser les règles, c’est toujours aussi un peu excitant, non?
À force d’apprendre à connaître ma sexualité, mes envies, mon corps, je me suis rendue compte que j’étais particulièrement excitée lorsque j’étais menstruée. J’avais la libido dans le tapis comme on dit. Et tellement de fois, au sommet de mon excitation sexuelle, j’me suis restreinte d’avoir des relations sexuelles. Ben voyons. Pis là, y’a probablement des puritain.e.s. qui vont me dire, franchement, tu peux pas juste attendre une semaine? Ce à quoi je réponds oui, mais pourquoi? Pourquoi cette restriction-là existe-t-elle si ce n’est pas dangereux pour personne? Pis à part de ça, mon désir, dans une semaine, il est crissement loin d’être garanti. Alors, pourquoi, mais pourquoi, on s’empêche d’avoir des relations sexuelles quand on a deux personnes consentantes qui ont envie l’une de l’autre?
Alors oui, j’en appelle à une révolution des désirs. Parce que je peux vous dire que je connais plusieurs filles qui ont la libido au ciel lorsqu’elles sont dans leur semaine et elles s’empêchent de profiter de leur désir. Et si je connais quelques garçons qui sont réticents, j’en connais aussi plusieurs qui ne s’y opposent pas du tout et qui apprécient.
Après tout, ça comporte quand même plusieurs avantages. Aucun problème de lubrification, des partenaires excité.e.s. et beaucoup, beaucoup de plaisir en perspective. Mais bon, soyez prévoyant.e.s. avec les draps quand même, hahaha!
Peace out,
Médusa
Médusa, étudiante en communication, dont les propos peuvent parfois être venimeux, mais qui n’a pas la langue dans sa poche. Provocante et animée par la sexualité, elle débat pour déconstruire l’image de la pute, de la vierge et de la mère.
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