Illustration : Alice (@halissss)
J’ai personnellement tendance à avoir plus de libido que la plupart des gars que j’ai rencontré. Je me masturbe plus souvent, j’ai des pensées sexuelles qui hantent constamment mon esprit et j’ai littéralement tout le temps le goût de faire l’amour. Dès que je suis triste, heureuse, fâchée, en plein milieu d’un cours à l’université ou en train de m’entraîner, l’envie de faire l’amour me prend par (plus ou moins) surprise. On peut donc dire que ça me pogne assez souvent. C’était quelque chose que je vivais plutôt bien et que je questionnais pas vraiment, jusqu’à ce que je me retrouve dans cette relation amoureuse avec « B », qui avait une envie sexuelle moins élevée et moins constante que la mienne.
« B », dont j’étais follement amoureuse, était reconnu anciennement pour avoir eu plusieurs partenaires. Étant mon ami depuis plusieurs années, je le connaissais très bien et j’étais au courant de ses ébats sexuels. Je m’étais donc faite une idée globale de sa libido. Au départ, je pensais seulement avoir une relation de fuckfriends avec lui et ça me convenait parfaitement puisque je me disais qu’il devait en avoir autant envie et besoin que moi.
Malgré moi, j’ai fini par développer des sentiments pour lui suite à plusieurs mois de fréquentation. Je dis malgré moi, parce que j’étais entêtée à jouer à la tough, et lui était entêté à ne pas vouloir tomber en amour. Mais bon, on s’est tous les deux fait avoir. Il faut dire que dès le début, le sexe était extraordinaire. On avait une chimie difficilement explicable et une facilité à communiquer qui rendait nos moments passionnels. Toutefois, et c’est vraiment pas une critique négative à son égard, je me suis trompée sur son réel besoin de faire l’amour. C’était une personne qui avait besoin de sexe par phases et seulement dans des moments précis. Quand il était fatigué, de mauvaise humeur et avait trop de choses en tête, faire l’amour ne lui traversait même pas l’esprit. Ce qui, je sais, est très compréhensible…. mais tout le contraire de moi.
Je me rappellerai toujours du jour où je me suis remise en question sur l’enjeu du consentement dans un couple. « B » et moi étions à la maison et j’avais vraiment envie de faire l’amour. Ça lui tentait plus ou moins, mais il avait décidé de me faire plaisir et on a finalement couché ensemble. Par contre, à la fin, quelque chose en moi se sentait de travers. Il avait l’air d’avoir eu du fun, mais malgré tout… je me sentais pas bien. C’est comme si physiquement, je sentais qu’il était moins entreprenant, malgré ce qu’il disait. On a donc eu une discussion et il m’a dit qu’il n’avait pas envie de coucher avec moi, mais que je semblais tellement en avoir besoin, qu’il avait choisi de le faire quand même. Je me suis sentie sale… genre limite dégueulasse. Je m’en suis voulue et je me suis réellement détestée. Je me suis questionnée à savoir s’il avait laissé paraître des signes et que je ne les avais pas écoutés par égoïsme ou s’il s’était juste dit ah je vais avoir le goût en le faisant. Il m’a rassuré sur mes actions et a même fait une blague sur le fait que j’avais réussi à l’exciter même s’il avait pas le goût… Mais on s’entend que c’est pas le but quand tu entreprends de coucher avec ton chum (!!!). C’est à ce moment que je me suis mise à avoir des remises en question sur la limite entre vouloir faire plaisir à l’autre et s’écouter soi-même. Moi aussi, j’ai déjà accepté pour faire plaisir à mon chum. Pas par réponse à du chantage, mais bien dans l’espoir de lui procurer du bien malgré mon (rare) manque d’envie à moi.
Pis ça me perturbe particulièrement comme remise en question, parce que dans ma tête, le consentement est un sujet qui est pas difficile à comprendre. Si une personne dit non, n’est pas en état d’émettre un consentement, ne démontre pas d’intérêt ou même change d’avis pendant l’acte, il est clair que la relation n’a pas lieu d’être. Je suis la première à crier haut et fort que « sans oui c’est non », et le sujet n’est même pas ouvert à débattre. Sauf que, pour la première fois de ma vie, j’étais confrontée à un volet du consentement qui peut être difficile à délimiter : le consentement dans un couple. Je veux être claire, le consentement reste le même au sein d’un couple, mais il peut être difficile de cerner la ligne entre je le fais pour te faire plaisir et je le fais parce que j’en ai envie.
Durant notre relation, je vivais des moments de frustration et de tristesse. J’avais l’impression qu’on faisait l’amour juste quand ça l’arrangeait lui et seulement quand il faisait les avances en premier. J’avais souvent l’impression qu’il n’avait pas envie de moi ou au contraire, que j’étais trop intense et que j’en demandais trop. Il ne me disait pas j’ai pas envie ce soir mais plutôt t’es jamais satisfaite ou encore je pourrai jamais te satisfaire. Donc, je ne le percevais pas comme un non situationnel, mais plutôt comme si j’étais le problème. Ça semble anodin, mais c’est vraiment quelque chose que tu finis par intérioriser et qui te joue dans la tête.
C’est extrêmement difficile de ne pas s’approprier le manque de libido de notre partenaire. C’est difficile de pas le laisser atteindre notre image de soi. C’est pourquoi je trouve le choix des mots important quand on veut exprimer que ça ne nous tente pas. Mais bon, tout ça pour dire que j’ai donc arrêté de lui faire des avances et j’attendais plutôt que ce soit lui qui me demande qu’on couche ensemble. Mais avec le temps et à force d’attendre, j’avais l’impression que mes désirs à moi ne comptaient pas. J’essayais d’être compréhensive et je voulais par dessus tout le respecter… Mais j’avais peur qu’en prenant un pas de recul, je réalise qu’il n’avait réellement pas envie de moi. Plus mon incertitude grandissait, plus c’était difficile pour moi de ne pas parler de mes désirs. À la fin, j’en faisais limite une obsession, c’était un sujet qui revenait tout le temps. Et souvent, quand j’en parlais, on finissait par coucher ensemble. Des fois, je tournais en blague le fait qu’il semblait avoir moins envie de moi, mais la plupart du temps j’avais réellement de la peine. Jamais je ne l’ai dit pour le manipuler ou dans l’espoir de le faire sentir mal, j’ai tout simplement toujours été transparente avec mes émotions.
Je n’ai jamais eu de sexe sans consentement. Mais un consentement donné dans l’espoir de faire plaisir à une autre personne malgré notre manque d’envie à nous en est-il réellement un? Faut-il s’arrêter à un oui de notre amoureux/amoureuse pour être certain.e que l’autre le fait aussi pour son plaisir ? Je crois que par amour, on est prêt.e à dépasser une ligne qu’on ne dépasserait pas pour un.e inconnu.e. Ces questionnements ont créé une zone grise dans ma tête que j’essaie encore de démêler. Est-il plus acceptable de mettre nos envies, ou dans ce cas manque d’envie, de côté par prétexte que l’on est dans une relation amoureuse saine? Le fait de partager notre frustration avec notre partenaire sur le manque de rapports et qu’iel décide par la suite de nous faire l’amour revient-il à exercer une pression sur l’autre ? Ce sont des questions auxquelles je réfléchis encore jusqu’à ce jour. Ne pas respecter le consentement de son ou sa partenaire ne se fait pas toujours de manière violente. Il faut apprendre à écouter et surtout à parler de manière transparente. Il faut apprendre à mettre des limites entre nos envies à nous et les envies de la personne avec qui on partage notre vie. Il faut partager notre perception de ce qu’est une sexualité saine, dans le but que cette zone grise devienne parfaitement claire.
Dans mon cas, j’ai dû apprendre à ne pas m’approprier le manque d’envie de mon ex. Et pour être franche, c’est extrêmement difficile se défaire de quelque chose que tu as fini par intégrer aussi profondément. Chaque personne a une libido qui diffère et le fait que « B » avait parfois moins envie d’avoir du sexe, ne voulait pas dire qu’il n’avait pas envie de moi. Ça m’a pris du temps à le comprendre et je l’ai réalisé trop tard pour sauver notre relation, à « B » et moi. Ce n’est pas ce qui a mené à notre perte et malgré tout, nous avons partagé selon moi une histoire exceptionnelle. Mais c’est un élément qui est venu entacher notre relation et y ajouter une pression qui aurait pu être évitée si on (surtout moi) avait su le gérer plus sainement. Je l’ai appris de manière difficile et c’est quelque chose qui m’a énormément blessé. En me replongeant dans la situation et en écrivant ce texte, je réalise que je suis surtout déçue de la manière dont j’ai géré les événements. Sans pouvoir retourner en arrière, c’est un apprentissage que je vais pouvoir maintenant appliquer dans mes relations futures…
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