Laurène (@somepieceofsheet)
J’ai toujours trouvé que je n’étais pas inclu.e dans ma gang d’ami.e.s au secondaire. Des liens se sont créés au fil des années, mais on dirait que j’étais toujours laissé.e de côté. C’est comme si j’avais de la misère à créer des liens aussi forts que les autres. J’étais proche de mes ami.e.s à l’école, mais vraiment moins en dehors des heures de cours. J’étais souvent oublié.e. J’aurais vraiment aimé que mes ami.e.s fassent plus d’efforts pour moi; qu’iels pensent plus à moi quand vient le temps de faire des soirées; qu’iels m’invitent plus en gros. Je leur en ai parlé maintes fois, dans l’espoir que les choses changent. Même si je ne fume pas ou ne consomme rien, j’aimerais être là! Même si je suis pas dispo, j’aimerais quand même recevoir une invitation pour me sentir inclu.e. Je pense qu’iels n’ont jamais bien compris ce que je voulais dire. Iels me répondaient souvent Non, mais invite-toi! Tu sais que t’es toujours la bienvenue et qu’on aime ça quand t’es là.
Mais je n’ai jamais senti que j’étais le.la bienvenue. Et j’ai pas envie de m’inviter, parce que je sens juste que j’impose ma présence et qu’elle n’est pas réellement voulue, vu que je n’étais pas invité.e concrètement. En plus, même si on allait au même secondaire, je n’habitais pas dans le même village que ma gang. Iels habitaient tous.tes, ou presque, dans le village où TOUT se passait: partys, chillings, hangouts, you name it. Moi, j’étais dans un village voisin à environ 30 minutes en voiture, donc je ne pouvais pas participer aux hangouts spontanés qui arrivaient quasiment toutes les fins de semaine. J’avais donc souvent l’impression de manquer des moments clés et des insides.
Malgré tout, le premier été qu’on a passé ensemble en sortant du secondaire était parfait. On se voyait souvent et je me sentais enfin inclu.e. Quand l’école a recommencé, on était dans des cégeps différents, mais on trouvait quand même le temps de se voir et de faire nos devoirs ensemble. On se parlait encore régulièrement. Mais plus l’année avançait, et moins c’était le cas. Je commençais à réaliser qu’en plus de la distance, nos centres d’intérêt divergeaient. Moi j’aimais rester chez moi tranquille et les chillings relaxs, alors qu’elleux voulaient sortir dans les bars. Par contre, je voulais quand même les garder dans ma vie, alors on se parlait un peu ici et là.
Plus le temps passait, plus je devenais solitaire. Je n’avais pu nécessairement le besoin de me sentir part of the gang et d’avoir leur validation. J’ai appris à me connaître et à m’écouter. Aussi, j’ai profité de ce repli sur moi pour pouvoir vivre les nouvelles découvertes que je faisais, comme ma sexualité, mon identité de genre et mes goûts musicaux. Je laissais entrer que mes sœurs, à qui je fais 100% confiance et qui pouvaient comprendre, voire avoir les mêmes intérêts que moi.
Je me suis beaucoup tourné.e vers le monde virtuel et les communautés en ligne qui partageaient les mêmes idéologies et les mêmes goûts que moi. Ça me donnait accès à un monde queer, un monde que j’avais jamais pu avoir, et ce contact m’était très précieux. Par contre, je vivais un peu (beaucoup) à travers les autres en ligne, pis je me suis rendu.e compte que je me retrouvais vite seul.e quand je revenais à la vraie vie et que je voulais aller faire des activités. C’est ben beau de les faire solo, mais à un moment donné, j’avais envie de partager mes expériences avec d’autres personnes. C’est vraiment là que j’ai réalisé que j’étais seul.e.
Après deux ans de communication minimale, mes relations amicales étaient devenues très sporadiques. Pis, je me suis mis.e à repenser à avant, à quand j’étais au secondaire. Je me suis dit ah ça serait l’fun de rebâtir ces relations avec mes ami.e.s du secondaire. Mais, en réalité, je n’étais pas sûr.e que ce soit une bonne idée. Comment savoir si mes efforts allaient mener à quelque chose cette fois, alors qu’ils n’ont jamais été fructueux? Comment être sûr.e que nos personnalités concorderaient encore, alors qu’on a tellement changé.e.s depuis le secondaire? Et je ne voulais pas redevenir la personne que j’étais juste pour pouvoir les voir. Je ne crois pas que ce serait très positif pour moi. Ça m’a fait mal de réaliser que j’allais peut-être perdre pour toujours ces ami.e.s, parce que malgré tout, je les aime ces personnes-là. Maintenant, je les regarde du sideline.
Ce qui est encore plus dur d’arriver à l’âge adulte avec très peu d’ami.e.s, c’est la peur de se retrouver seul.e pour vrai. Puis ça m’est arrivé. La seule personne que je croyais ne jamais pouvoir me séparer de, ben on se parle plus. Ça m’a pris du temps à comprendre ce qu’il se passait, aka que je me faisais ditch. Je voulais pas le croire parce que je ne pensais pas qu’elle était capable de vraiment me laisser de côté. Pas après ce que j’ai été pour elle durant ces trois dernières années, ma foi difficiles et étranges. #jeneméritaispasça. Genre je sens tellement que je suis full forgettable et full remplaçable! On se parlait à chaque jour putain. Ce break up amical m’a beaucoup fait réfléchir sur moi, sur ce que je dégage et sur comment ma timidité fait que je me referme sur moi. J’ai beaucoup pensé à notre relation; comment les choses auraient pu être différentes, comment notre amitié était si faible finalement et comment mes efforts pour l‘améliorer m’ont encore mené.e tout.e seul.e. Je crois que je sors de cette relation plus fort.e. Maintenant, je vais voir les signaux de négligence, je ne vais pas toujours m’accommoder pour les autres et je reconnais vraiment plus ma valeur et ce que je peux apporter en tant qu’ami.e. Mais… je ressors aussi avec un peu de trust issues parsemés ici et là. J’ai toujours cette peur d’être délaissé.e encore une fois par les gens qui m’entourent et j’ai peur de laisser d’autres personnes voir ma vulnérabilité et qu’elles l’utilisent contre moi.
Finalement, les amitiés post-secondaires ne sont vraiment pas ce que je pensais. Je me voyais avec mes ami.e.s du secondaire pour le reste de ma vie. Je pensais qu’on allait continuer de se parler chaque jour, chaque semaine, pour se raconter nos journées comme on l’avait toujours fait. Je pensais que nos relations allaient vieillir avec nous; qu’on allait passer les grandes étapes de notre vie ensemble, comme s’aider à déménager de chez nos parents, aller souper les vendredis soirs comme des vrai.e.s adultes, vivre nos pires ruptures de couple, etc. Je croyais vraiment qu’on allait grandir ensemble comme on se l’était dit tout au long du secondaire. Je croyais vraiment que mes amitiés étaient plus solides qu’elles ne l’étaient. J’avais espoir qu’elles durent.
Je me lance donc dans l’aventure de me faire des nouveaux.elles ami.e.s. J’ai toujours trouvé ça tellement difficile, mais en ce moment j’ai pas vraiment le choix. Malgré ma réticence, je dois laisser de nouvelles personnes entrer dans ma vie, leur donner une chance, et surtout leur faire confiance. Je dois croire qu’il y a des gens qui m’accepteront comme je suis, et que je peux me faire un cercle d’ami.e.s dans lequel je peux blossom et grandir. Je pense que je suis plus à l’aise maintenant qu’il y a trois ans pour sortir de ma zone de confort et me faire des ami.e.s. C’est plutôt une chose excitante, qu’épeurante. C’est cool de se sentir enfin prêt.e et ouvert.e à la nouveauté!
Bébé Anastasia