***Lumière sur des femmes inspirantes du passé***
Recherche et rédaction : Maude Savaria – Historienne et archiviste (@msavacou)
Illustration : Laura (@viraesworks)
Dre. Gladys Lynn Jones
Dre. Lynn naît dans le “Marsh” de Truro en Nouvelle-Écosse, un quartier réunissant des descendant-e-s des réfugié-e-s et loyalistes noires arrivé-e-s au pays à la fin du XVIIIe siècle. Ses parents et son frère sont des leaders communautaires connus de leurs pairs. Elle grandit en assemblant des scrapbooks sur sa famille et sa communauté : leurs succès, leurs luttes et les discriminations qu’elles vivent. À l’époque, les écoles primaires et les espaces publics sont ségrégués, ce qui ne l’empêche pas de briller en musique et en sport.
En 1972, elle entreprend un baccalauréat en arts à l’Université Dalhousie d’Halifax. Déjà activiste, elle s’implique contre la guerre du Vietnam et la discrimination raciale dans sa province. En 1979, elle obtient un emploi au Centre d’emploi Canada et remarque que ses collègues blancs ne réfèrent pas les gens provenant des quartiers majoritairement noirs pour des emplois pourtant disponibles. Sa dénonciation ne change rien et elle décide de s’engager dans son syndicat local. Subissant aussi le racisme au niveau syndical, elle rallie celleux qui ne s’impliquent pas et se fait élire présidente. Bonne organisatrice ouvrière, rassembleuse, elle est élue vice-présidente du Canadian Labour Congress (CLC – syndicat national) au début des années 1990, une première pour une femme noire. Elle y coordonne des études et conférences sur le racisme. Au niveau local, elle mène un sit-in de 122 jours en 1996 contre la fermeture d’un centre d’emploi desservant un quartier défavorisé de la communauté noire d’Halifax.
Ce qu’elle apprend dans le mouvement ouvrier, elle l’applique dans son militantisme communautaire. Elle organise des formations pour la African United Baptist Church Association afin que les membres de la communauté soient informés de leurs droits et des mécanismes de changement. Elle participe au projet ENRICH, une étude sur le racisme environnemental en collaboration avec des artistes noir-e-s et mi’kmaq. Elle dénonce les installations publiques de décharges, notamment de déchets toxiques, aménagées près des quartiers majoritairement noirs et pauvres ou des territoires autochtones. En 1993, elle est la première femme noire née au Canada à se présenter aux élections fédérales pour le NPD. En 1994, elle est observatrice pour les élections présidentielles en Afrique du Sud, celles où Nelson Mandela est élu. Plus récemment, elle se concentre sur l’enjeu des réparations pour les injustices vécues par les victimes du commerce d’esclaves et leurs descendant-e-s au sein du Global African Congress.
Honorée par plusieurs prix, elle se voit décerner un doctorat honorifique de l’Université Acadia. À la retraite de sa carrière dans la fonction publique (et syndicale!) depuis 2011, elle continue son militantisme encore aujourd’hui.