Illustration : Layloo (@layloolapierre)
Durant la dernière année en confinement, je me suis posé full de questions sur ma sexualité, du genre est-ce que je suis attiré.e par les filles? suis-je bisexuel.le? pansexuel.le?. Je suis venu.e à la conclusion que je ne voulais pas un terme précis pour décrire ma sexualité, mais je me considère membre de la communauté LGBTQ+. J’aime qui j’aime et c’est tout. Je croyais que ma remise en question était finie après celle de la sexualité. Jokes on me. Cue la crise d’identité de genre.
Je ne m’étais jamais posé de questions sur mon genre avant le début de l’été. J’ai assumé que j’étais une femme, vu que c’est comme ça qu’on m’a socialisé.e. Mon contact virtuel (via tiktok) avec des personnes non-binaires a fait naître en moi des questionnements sur l’expression et la binarité des genres. Plus je pensais aux genres en général et comment je voulais exprimer le mien, moins je voulais me mettre dans une case, tsé comme celle que tu dois cocher quand tu remplis un questionnaire. Cette boite qui te suggère deux genres, homme ou femme, avec ses normes fixes associées. Des normes qui te disent que les cheveux longs, le rose, les jupes et le maquillage, ce sont des choses pour les filles, alors que le bleu, les suits, les postes hauts placés et les cheveux courts, ce sont des choses pour les gars. Sauf qu’il manque d’options dans ces construits sociaux. Je ne veux pas définir ma sexualité avec un simple mot et je ne veux pas définir mon genre aussi simplement.
J’ai envie de revisiter les conventions sociales autour du genre. On dirait que je m’identifie en tant que femme, mais aussi autre chose. J’ai pas le goût d’être perçu.e que comme une femme, mais en même temps je suis fier.ère de l’être. J’aimerais avoir l’espace pour découvrir mon côté plus masculin et trouver comment je voudrais exprimer mon genre avec un terme qui me définirait mieux. Peut-être que je suis plus confortable avec les genres neutres?
Je suis presque rendu.e à faire les fameux quiz du genre est-ce que je suis gai.e?, mais version non-binaire. Par contre, j’ai peur de la réponse parce que je me sens un peu comme un.e imposteur.e dans mes questionnements. Je suis très female presenting, donc, j’ai des traits féminins et je porte du linge qu’on appellerait « pour femme » et je sens qu’on (et que je) associe la non-binarité plutôt aux personnes androgynes. Les gens me voient comme une femme, alors j’ai l’impression que l’image que je projete socialement vient contre-argumenter mes questionnements sur mon genre.
J’ai appris dans la dernière année que tu pouvais spécifier tes préférences de pronoms et je songe à faire cela. En anglais, il y a un pronom neutre (they/them). J’ajouterais peut-être ce pronom à celui que les autres utilisent pour parler de moi. Cependant, ça serait plus dans les milieux anglophones que je côtoie. Le pronom they est beaucoup plus répandu et normalisé dans la société et la langue courante que l’équivalent en français iel. Pour ce qui est du français, le pronom féminin (elle) m’interpelle plus que le pronom neutre reconnu (iel). Malgré l’inclusion de ce pronom dans le dictionnaire, la langue inclusive reste très peu connue et très peu utilisée en français. Le pronom féminin (elle) ne me dérange pas dans ce cas, mais je ne veux pas être restreint.e à ce mot de quatre lettres.
J’ai aussi un sentiment d’imposteur.e parce qu’on dirait que j’ai pas l’énergie de corriger les gens qui prendraient pour acquis que je suis une fille, alors que finalement je suis pas juste ça. Cette situation à un mot précis, soit mégenrer ou to misgender en anglais. Mon sentiment d’imposteur.e fait naître beaucoup de questions en moi. Est-ce que ça fait que je suis pas non-binaire si je veux pas me battre pour m’assumer? Est-ce que c’est seulement que je veux être cool vu qu’on dirait que c’est « la mode » d’être non-binaire? C’est vrai que c’est trendy, mais j’avoue qu’il n’y a rien de mal à vouloir explorer la non-binarité, quitte à changer d’idée après si ça ne me représente plus. La binarité des genres, c’est vraiment juste un concept qui mérite d’être déconstruit!
Pour l’instant, tous ces questionnements, je les garde pour moi. Je ne les partage pas parce que j’ai peur de ne pas être pris.e au sérieux. Je ne les partage pas parce que j’ai peur du jugement que les autres pourraient avoir. Je ne les partage pas parce que j’ai l’impression que la non-binarité commence tout juste à être acceptée, et encore, pas mal juste acceptée dans mon petit monde de « gauche » et virtuel. J’ai aussi peur d’être lourd.e avec ce changement. Tout cela est encore nouveau pour moi et je suis loin d’avoir fini mon exploration des genres.
Par contre, j’ai un frein à la découverte de mon genre et à mon expression de genre. J’habite dans un petit village où tout le monde se connaît depuis le primaire. Dans ce type de petit village, un changement physique, ou même un changement de tes intérêts, ne passe pas inaperçu. J’aime bien passer sous le radar et je sens que ce changement me ferait vraiment sortir du lot. Je ne me sens pas vraiment à l’aise de continuer mon exploration de genre dans mon village.
En gros, je suis rendu.e là dans ma découverte. Je veux continuer d’explorer et de me questionner. J’essaye de calmer mon sentiment d’imposteur.e; je réalise tranquillement que les idées préconçues que j’ai de la non-binarité sont parfois très loin de la réalité. Tu peux être female presenting ou male presenting et être une personne non-binaire. Also, Tu peux aimer les choses typiquement préférées des femmes et être une personne non-binaire. Tu peux aussi être une femme et full t’assumer dans ta masculinité ou être un homme female presenting.
C’est tout un travail de déconstruire le concept des genres et de voir plus loin que les cases préconçues par les normes sociales. Par contre, ça fait du bien. Un jour, je vais peut-être décider de rajouter d’autres pronoms ou pas, je vais voir où cette découverte me mène.
Bébé Anastasia
Fanatique de l’art en tout genre, de sexe, et de chocolat, Bébé Anastasia rêve de devenir sexologue, designer ou pourquoi pas les deux. Après avoir été niaisée solide par un dude immature, elle jure qu’on ne l’y reprendra plus. No more! Son objectif ultime : normaliser le sexe et le plaisir, tout en se battant pour le droit à une éducation sexuelle pour toustes. Just watch her, vous êtes pas prêt.e.s!